
Pourtant, Aimée et Jaguar est un film édulcoré. Une sorte de copie hollywoodienne d’une histoire trouble et gênante, celle de Felice (Jaguar), homosexuelle juive travaillant pour un journal de propagande hitlérienne, et de Lili, une bourgeoise se complaisant tellement dans les bras de ses amants nazis qu’elle a épousé l’un d’eux. Si le choix des actrices est parfait pour incarner les femmes des Années Folles dans le Berlin en guerre, leurs personnalités sont tellement romancées qu’on passe à côté de l’essentiel : en mettant en avant la joie de vivre de Felice et sa frivolité, le film passe à côté du combat de cette femme qui, pour ne pas se faire dévorer par le monstre, n’a eu d’autre option que de se cacher dans son ventre.
Suit en bonus le témoignage de Lili (Aimée). Celui-ci provoque un tel sentiment de malaise qu’on sent la nausée poindre. Cette femme, gratifiée de la décoration des « Héroïnes anonymes » et considérée par les autorités germaniques comme une résistante, évite soigneusement d’évoquer les années précédant sa rencontre avec Felice. Epoque trouble où elle faisait un peu plus que de cohabiter avec le nazisme : elle s’abandonnait à lui. Sa conversion au judaïsme (et celle de ses enfants) ressemble à une tentative de prouver une valeur dont on est en droit de douter…
Aimée et Jaguar est un film déroutant. Son intérêt réside dans les questions brûlantes qu’il soulève. A regarder pour se faire sa propre idée. Si vous ressentez le même malaise que beaucoup de personnes qui l’ont vu, c’est peut-être que quelque chose en vous est toujours en alerte.
Aimée & Jaguar, réalisé par Max Färberböck, avec Maria Schrader et Juliane Köhler, édité par Antiprod, avril 2005.
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